Au Au commencement était le mot
 

1.- Dans la prière de Jésus, la première chose qu´il demande à son Père, c´est que son nom soit sanctifié. Et cependant, cela nous paraît superflu : quelle nécessité pour Dieu, « le saint »(Is 6,3), que son nom soit sanctifié ? Comme le disait Saint Augustin : « Ne semble-t-il pas que, lorque tu demandes la sanctification de Dieu, tu pries Dieu pour lui-même, et non pour toi-même ? ». Par ailleurs : la question du nom n´est-elle pas pure convention ?

2.- Dans la Bible, le nom exprime la réalité des choses et des personnes, leur rôle, leur sens, leur fonction. Il indique aussi la dimension sociale de la personne, en d´autres termes, son renom. De cette manière, sanctifier signifie louer, bénir, glorifier. Il est dit dans le psaume 113 : Louez, serviteurs du Seigneur, louez le nom de Yahvé ! Dès maintenant et à jamais ! Du lever du soleil à son coucher, loué soit le nom du Seigneur !

3.- Dans les débuts, le Dieu d´Israël n´a pas de nom personnel, mais il est connu pour sa relation d´amitié avec les patriarches : il est le Dieu d´Abraham, le Dieu d´Isaac et le Dieu de Jacob. Avec Moïse, Dieu révèle son nom : Hahvé, celui qui est avec son peuple, le Seigneur (Ex 3,14). Il est un dieu vivant, qui dénonce l´oppression et qui ouvre un chemin de libération : J´ai vu, j´ai vu la misère de mon peuple qui est en Égypte (Ex 3,7). Plus tard, c´est son nom qui réunira les tribus dispersées.

4.- Il est le seul vrai Dieu :  Avant moi aucun dieu n´a été formé et après moi il n´y en aura pas (Is 43,10). Israël n´aura pas d´autres dieux : Tu ne te prosterneras pas devant un autre dieu, car Yahvé a pour nom Jaloux (Ex 34,14). Israël invoquera le nom du Seigneur, mais, lorsqu´il jurera par son nom, il ne commettra aucune fraude ni n´en abusera : Vous ne commettrez point de fraude en jurant par mon nom ; tu profanerais le nom de ton Dieu   (Lv 19,12).

5.- Très fréquemment dans les psaumes, on loue le nom du Seigneur : Je rendrai grâce à Yahvé pour sa justice, je veux jouer pour le Nom du Très-Haut (Ps 7,18), Yahvé, notre Seigneur, qu´il est puissant ton nom par toute la terre !(8,2), j´exulte et me réjouis en toi, je joue pour ton nom  (9,3), j´annoncerai ton nom à mes frères, en pleine assemblée je te louerai   (22,23), rapportez à Yahvé la gloire de son nom (29,2), exaltons ensemble son nom (34,4), je rendrai grâce à ton nom, car il est bon (54,8), je jouerai sans fin pour ton nom (61,9), toute la terre chante pour ton nom (66,4), chantez à Dieu, jouez pour son nom (68,5), je louerai le nom de Dieu par un cantique (69,31), il est bon de rendre grâce à Hahvé, de jouer pour ton nom, Très-Haut (92,2), bénis Hahvé, mon âme ; du fond de mon être, son saint nom (103,1), je rends grâce à ton nom pour ton amour et ta vérité (138,2), je bénis ton nom toujours et à jamais (145,1).

6.- Dans les psaumes, nous découvrons de nombreuses manières d´invoquer le nom du Seigneur  et de le bénir, et ceci, dans les situations les plus variées : Notre âme attend le Seigneur, notre secours et notre bouclier, c´est lui ; en lui, la joie de notre coeur, en son nom de sainteté notre foi (33,20-21), oui, au sanctuaire je t´ai contemplé, voyant ta puissance et ta gloire. Meilleur que la vie, ton amour ; mes lèvres diront ton éloge. Oui, je veux te bénir en ma vie, à ton nom, élever élever les mains (63,3-5), Béni soit Yahvé, le Dieu d´Israël, qui seul a fait des merveilles ; béni soit à jamais son nom de gloire, toute la terre soit remplie de sa gloire !(72,18-19), aide-nous, Dieu de notre salut, par égard pour la gloire de ton nom (79,9), puisqu´il s´attache à moi, je l´affranchis, je l´exalte puisqu´il connaît mon nom (91,14), rendez grâce à Yahvé, criez son nom, annoncez parmi les peuples ses hauts faits ; chantez-le, jouez pour lui, récitez toutes ses merveilles ; tirez gloire de son nom de sainteté (105,1-3), non pas à nous, Yahvé, non pas à nous, mais à ton nom rapporte la gloire, pour ton amour et pour ta vérité! (115,1).

7.- Nous sommes au cours de l´année 592 avant J.C. Le prophète Ézéquiel se trouve à Tel Abib, au bord du fleuve Kebar, à environ 1 300 kilomètres de Jérusalem, au milieu d´une communauté de déportés. Pour Ézéquiel, l´expérience de l´exil n´est que le résultat d´une dégénération dont le peuple n´a pas conscience. La profanation du nom de Dieu contamine le peuple et le disperse alors que, en revanche, la sanctification de son nom le purifie et le rassemble. Par la faute d´Israël, les nations se sont formées une fausse idée de Dieu : Ce n´est pas à cause de vous que j´agis de la sorte, maison d´Israël, mais c´est pour mon saint nom que vous avez profané parmi les nations où vous êtes venus. Je sanctifierai mon grand nom qui a été profané parmi les nations au milieu desquelles vous l´avez profané. Et les nations sauront que je suis Yahvé... quand je ferai éclater ma sainteté, à votre sujet, sous leurs yeux. Alors, je vous prendrai parmi les nations, je vous rassemblerai de tous les pays étrangers et je vous ramènerai vers votre sol. Je répandrai sur vous une eau pure et vous serez purifiés : de toutes vos souillures et de toutes vos ordures  je vous purifierai (Ez 36,22-25).

8.- C´est dans cette perspective de purification que se situe la mission de Jean qui baptise dans l´eau, en vue de la conversion (Mt 3,8). Et c´est dans cette même perspective   –tout en l´assumant et en la dépassant-   que se situe la mission de Jésus : il appelle à la conversion et il annonce le Royaume de Dieu en action (Mc 1,15), il baptise avec l´Esprit Saint (1,8), il manifeste à ses disciples le nom de Dieu (Jn 17,6), et, au nom de Dieu, il purifie le temple (Jn 2,13-22).

9.- Le nom qui manifeste le plus en profondeur l´être de Dieu, c´est celui de Père. Et Jésus le fait connaître (Mt 11,25 et suivants). Il demande au Père : que ton nom soit sanctifié (Lc 11,3). De même, avant sa mort qu´il conçoit accompagnée de la fécondité du grain de blé qui tombe en terre et qui produit du fruit, Jésus dit : Père, glorifie ton nom (Jn 12,28). Et Dieu le fera en manifestant son action et sa gloire en faveur de Jésus, en lui donnant le nom qui est au-dessus de tout nom ; afin qu´au nom de Jésus tout genou fléchisse, dans les cieux, sur la terre et sous la terre, et que toute langue proclame que le Seigneur, c´est Jésus Christ à la gloire de Dieu le Père (Ph 2,10).

10.- Au cours du dernier repas, Jésus prie ainsi : Pèrs juste, le monde ne t´a pas connu, mais moi je t´ai connu et ceux-ci ont reconnu que tu m´as envoyé. Je leur ai fait connaître ton nom et je le leur ferai connaître, pour que l´amour dont tu m´as aimé soit en eux et moi en eux »(Jn 17,25-26).

11.- Les chrétiens doivent louer le nom de Dieu et ils doivent faire attention à ce que leur conduite n´induise pas les autres à blasphémer. Pour cette raison, l´avertissement de Paul a une valeur permanente :Eh bien, l´homme qui enseigne autrui, tu ne t´enseignes pas toi-même ! tu prêches de ne pas dérober, et tu dérobes ! tu interdis de commettre l´adultère, et tu commets l´adultère ! tu abhorres les idoles, et tu pilles leurs temples ! Toi qui te glorifies dans la Loi, en transgressant cette Loi, c´est Dieu que tu déshonores, car le nom de Dieu, à cause de vous, est blasphémé parmi les païens, dit l´Écriture (Rm 2,21-24). En tant qu´Église « sainte et qui a besoin de purification » (LG 8), qui se renouvelle par la conversion à l´Évangile, nous savons qu´à l´origine de l´athéïsme « il peut y avoir une participation non négligeable des croyants eux-mêmes, dans la mesure où, par l´abandon de l´éducation religieuse, ou par l´exposition inadéquate de la doctrine, ou même par les défauts de leur vie religieuse, morale et sociale,  ils ont caché –au-lieu de le révéler- le visage authentique de Dieu et de la religion » (GS 19).

12.- Et maintenant aussi, comme à l´époque d´Ézéquiel et à l´époque de Jésus, l´avenir se trouve dans la communauté renouvelée, purifiée. Et cela peut se réaliser parmi nous : Ainsi votre lumière doit-elle briller devant les hommes afin qu´ils voient vos bonnes oeuvres et glorifient votre Père qui est dans les cieux (Mt 5,16). De cette manière, le nom de de Dieu n´est  ni prophané ni blasphémé, mais au contraire, il est béni et glorifié : Comme ton nom, Dieu, ta louange jusqu´au bout de la terre !(Ps 48,11). L´Écriture nous y invite : Et maintenant de tout coeur, à pleine bouche, chantez, et bénissez le nom du Seigneur ! (Si 39,35). Et aussi : Par Lui, offrons à Dieu un sacrifice de louange en tout temps, c´est à dire le fruit de lèvres qui confessent son nom (Hb 13,15).

 

* Dialogue : Que demandons-nous, lorsque nous disons : que ton nom soit sanctifié ?